Antifaschistische Aktion, 1995

Betacam SP, PAL, couleur, son


La pratique de la vidéo occupe une place particulière dans le travail de Thomas Hirschhorn, elle est en effet complémentaire à son utilisation des lay-out, expression qu'il utilise pour désigner ses installations et les systèmes de représentations qu'il a mis en place. Ses vidéos prennent un sens au regard de sa pratique du dessin ou de la sculpture comme 50/50 à Belleville en 1992, Les monstres en 1993 ou une série réalisée en 1995 (Robert Walser Video, Antifaschistiche Aktion, I Will Win, Thank You). Ces quatre vidéos, toutes tournées en 1995, peuvent s'envisager comme une série sur le plan de la construction et des éléments formels. Elles sont tournées dans l'atelier de Thomas Hirschhorn, en plan fixe. Le cadre est conçu comme celui d'un tableau. Leur durée est conditionnée par la longueur d'un morceau de rock, un peu à la manière d'un clip vidéo. Le son est diffusé sur un système de qualité médiocre, il n'est pas ajouté au montage mais c'est le son enregistré en direct dans l'atelier. Thomas Hirschhorn privilégie toujours le sens au détriment d'une qualité formelle qui pourrait enjoliver la lecture de ses œuvres : de la même manière qu'il exploite des matériaux jugés non nobles par la tradition de l'art, il diffuse la musique sur un support de qualité commune. L'artiste utilise en arrière plan ses collages ou ses dessins et se met en scène dans les attitudes de la protestation : poing levé, drapeau militant, torse nu comme un guérillero. Chaque vidéo peut se lire comme une performance. Avec Antifaschistische Aktion, le plan s'ouvre sur une sorte d'autel recouvert d'un drap blanc sur lequel sont posés deux collages de l'artiste, un magnétocassette et un drapeau sur lequel est écrit le titre de la vidéo en grosses lettres. Thomas Hirschhorn fait apparaître son bras sur la gauche du cadre brandit son poing sur un morceau du groupe irlandais U2 I Need You Love. Son bras bouge en rythme avec la musique au son saturé jusqu'à la fin du morceau. Le titre nous renvoie à l'engagement social de l'artiste suisse, qu'il distille dans chacune de ses œuvres en voulant en faire des supports de prise de conscience collective.


Laetitia Rouiller