Portrait/Kopf, 1981

4 à 6 moniteurs, 4 à 6 bandes vidéo, PAL, couleur, silencieux, 30’


Sur quatre moniteurs distribués frontalement selon des hauteurs différentes, dans un espace obscur, apparaissent des " têtes " humaines dans diverses positions (de face et de profil) et, pour certaines, en mouvement (rotation d'un profil à l'autre). Chaque bande vidéo, d'une durée d'une trentaine de minutes en boucle, répond à un rythme progressif de défilement de portraits, individualisés au départ, puis qui se fondent les uns dans les autres jusqu'à ne produire qu'un seul visage, animé de légères pulsations sur les contours. Le projet de Karl Harmut Lerch et Klaus Holtz est né en 1980 lors de la Biennale de Paris, durant laquelle les artistes ont collecté quelques photogrammes de milliers de visiteurs, en calant leurs yeux sur la même ligne. Transférées en vidéo et nourries par de nouvelles prises de vues, ces images ont été montées les unes derrière les autres selon un rythme progressif : quelques photogrammes par visage, puis un visage par photogramme, jusqu'à une vitesse pouvant atteindre 20 000 images par seconde. Le résultat, décliné selon des poses différentes, laisse voir un visage générique où toute particularité est effacée au profit d'une moyenne : une sorte de portrait de l'humanité se dessine, évoquant les figures idéales de Léonard de Vinci, ou bien les synthèses monstrueuses de Nancy Burson. Le trouble que ces images produisent sur le spectateur n'est pas sans évoquer le débat autour de l'aura amorcé en 1935 par Walter Benjamin. Les questions de l'identité et de l'expression, de l'unité et du multiple, du singulier et du quelconque sont posées ici à partir d'un traitement technique à la croisée de la photographie, du film et de la vidéo. Elles anticipent sur les procédures digitales du morphing.


 


Françoise Parfait