Human Synth (Paris), 2021
Installation multimédia intéractive
Ordinateur, programme d’analyse de sentiment prédictif, Alienware VRPC, twitter API, projection vidéo numérique, 16/9ème , couleur, silencieux, durée illimité.
L'artiste Mika Tajima explore depuis le début des années 2000 la marge d’action de l’individu face aux pouvoirs qui s’exercent dans l’espace social. Au sein de sa pratique, de nombreux projets portent notamment sur la manière dont les corps, les sentiments et les comportements sont conditionnés par notre environnement professionnel et technologique.
Sa série d’œuvres Human Synth simule des volutes de fumée à partir des messages postés par les habitants d’une ville – dans le cas présent Paris – sur le réseau social Twitter. Originellement collectées en temps réel, ces données sont analysées pour réaliser le portrait émotionnel de la ville. A partir de celles-ci, un algorithme tente de prédire l’évolution de l’état d’esprit de la population, rendue visible par les variations formelles de la fumée générée.
Par l’oxymore de « synthétiseur humain » qui lui donne son titre, l’œuvre se place au croisement de l’expression individuelle et de son traitement technologique : une tension au cœur de l’exploitation massive des données personnelles que pratiquent les géants du capitalisme numérique. L’œuvre de Mika Tajima fait dans le même temps écho à la pratique ancestrale de la capnomancie qui, de la Mésopotamie à la Malaisie en passant par la Grèce, a tenté de lire l’avenir à travers l’analyse de la fumée.
Les volutes de synthèse de Mika Tajima produisent des prédictions qui, pour le spectateur, resteront cryptiques. Les échos de mégalopoles – Tokyo, Instanbul, Los Angeles ou Paris – nourrissent ainsi une improvisation machinique insaisissable, qui transforme le bruit du monde en silence calculé.
Philippe Bettinelli, 2025